Frankenstein, film de James Whale, 1931 Universal Studios, renewed 1959 Universal Studios
Avec Dracula de Tod Browning, Frankenstein est le titre inaugural d’un âge d’or du fantastique américain, sous l’égide du producteur Carl Laemmle Jr, fils de Carl Laemmle, fondateur de Universal Pictures. Il allait succéder à son père en 1928 à la tête du studio et lancer la mode des films d’horreur avec une série de longs métrages centrés autour de figures monstrueuses, destinées à devenir patrimoniales.
Inspiré du roman de la jeune Anglaise Mary Shelley Frankenstein ou le Prométhée Moderne, publié en 1818, déjà adapté de nombreuses fois au théâtre et dans des bandes muettes, Frankenstein se démarque de son origine littéraire pour inventer un fantastique nouveau, entre expressionnisme et modernité. La mise en scène échappa à Robert Florey et ce fut finalement James Whale, metteur en scène britannique installé à Hollywood, qui s’empara du mythe et lui conféra une certaine sophistication. D’abord pressenti pour le rôle de la créature, Bela Lugosi, réticent à l’idée d’être cantonné dans des personnages monstrueux – il venait d’interpréter Dracula – déclina l’offre et c’est un excellent acteur de complément, Boris Karloff, qui hérita du rôle. Karloff, par sa composition inoubliable, va donner ses premières lettres de noblesse cinématographiques à la créature de Frankenstein, aidé par le maquillage génial de Jack Pierce, destiné à entrer dans la légende. C’est la naissance d’une icône. Le film frappe encore par sa cruauté, sa violence. Le monstre y apparaît comme une figure pathétique, plus tragique qu’effrayante, enfantée par un savant mégalomane toujours au bord de la crise de nerfs – le docteur Frankenstein dans un élan blasphématoire se met à hurler « maintenant je sais ce que peut ressentir Dieu » lorsque les bouts de cadavres qu’il a réanimé grâce à la foudre se mettent à remuer.
Frankenstein est sans doute l’un des films les plus cités, parodiés et plagiés de l’histoire du cinéma. D’abord à la Universal avec une série de films prolongeant le classique de Whale puis un peu partout dans le monde, aux Etats-Unis, en Europe et en Asie, jusqu’à nos jours, pour le meilleur et surtout le pire.
Frankenstein rencontrera un immense succès à sa sortie, effrayant et sidérant des spectateurs guère habitués à de tels déchainements macabres sur un écran de cinéma. Une suite directe sera réalisée en 1935 avec les principaux responsables du premier film devant et derrière la caméra : La Fiancée de Frankenstein, de l’avis général supérieur à son modèle, un pur chef-d’œuvre à la folie et à la poésie inaltérables.